La route nous rappelle en ce début du mois de septembre, nous passons la frontière et entrons en Turquie. En longeant la mer Noire, nous découvrons des plantations de thé dont les buissons, taillés à raz, accentuent les courbes des collines pentues.
Notre petit bus avale les kilomètres ; les collines couvertes des feuilles vertes du çhai laissent place aux noisetiers. La Turquie est le plus gros producteur de noisettes au monde (70%). Lors d’une escale dans la ville balnéaire de Giresun, nous sommes happés par l’activité frénétique autour de ces petits fruits à coque. Etalés par milliards sur des bâches en plastique, les noisettes sèchent sur les trottoirs de la ville. Allongées dans cette mer de billes chocolat, des dizaines de femmes trient les fruits pour en extraire les vides avant de les mettre dans des sacs qui partiront pour les usines de confiseries européennes. Au gré des rues les ambiances éclatantes impriment notre rétine. Boutiques de tissus dorés, céramiques bleues et paniers d’épices ocre et rouge, la Turquie est aveuglante de couleurs.
L’année dernière à l’automne, nous découvrions les paysages lunaires et lumineux de Cappadoce. Nous y revoilà ! Même endroit, pile un an plus tard.
Nous retrouvons nos amis Mustafa et Çaglar dans leur salon de thé troglodyte. Fidèles au souvenir que nous avions d’eux, ils nous invitent à rester quelques jours dans la Vallée des Pigeons. Rien n’a changé avec nos vieux amis ; nous passons les soirées chaleureuses autour du poêle à jouer au Backgammon puis contemplons le lever du soleil, lovés dans des canapés creusés dans la roche, bercés par les claquements d’ailes des nichées d’oiseaux. Dans cette vallée de pierre, chaque famille élevait autrefois quantité de pigeons. Les fientes y étaient récoltées pour nourrir la terre et cultiver les jardins.
Chaque matin, nous observons de notre camping favori une centaine de Montgolfières s’envolent au-dessus de la Cappadoce. Elles scintillent dans la vallée avec leurs flammes, avant de quitter le sol, gonflées de toute leur fierté. En discutant avec les commerçants, nous notons un net changement par rapport à l’année dernière : les touristes européens se font rares. Ce sont maintenant Chinois, Indiens et Qataris qui s’envoient en l’air dans ces dirigeables. Les activités principalement axées sur les randonnées, hammams et gastronomie ont évolué vers les safaris en quad, ballons dont les billets se vendent jusqu’à 1 500 € au marché noir et sorties en Cadillac rutilante pour LE shooting photo que tout bon Instagrameur ne manquera pas… Alors même si la petite ville de Göreme a vu fleurir 14 restaurants chinois en un an, nous sommes admiratifs de la capacité d’adaptation des Turcs. Cela nous encourage aussi à reprendre notre route hors des sentiers (trop) battus.